Vous
commencerez par remonter la Ráday utca jusqu’à Kálvin tér. Si la place est encore en
travaux, elle se conforme déjà entièrement aux standards de l’urbanisme
occidental : interconnexion entre le tram et le métro, larges espaces
réservés aux piétons, grands bâtiments en verre, enseignes, publicités
tapageuses. Vous vous engagerez ensuite sur un grand boulevard : Múzeum körút. Vous passerez alors devant
un grand bâtiment néoclassique à la façade ornée d’une colonnade et d’un escalier
majestueux, c’est le Magyar Nemzeti
Múzeum, le musée national de Hongrie. Les hauts immeubles Art Déco seront
gris ou noirs ou entièrement restaurés, ou alors tomberont tellement en ruine
que des barrières protègeront les piétons des chutes de pierres. Puis vous
découvrirez sur votre droite l’élégante façade de briques, surmontée de deux
bulbes dorés, de la Dohány utcai
zsinagóga, la grande synagogue, avant de pénétrer par la Dob utca dans le quartier juif,
labyrinthe de cours souvent délabrées, d’autres fois transformées en lieux se
sorties à la mode. Parfois, vous verrez la brique laissée à nu par la chute du
plâtre au pied de la façade d’une vieille synagogue, vous regarderez sa porte
en bois noirci par les hivers, et vous vous rappellerez les années de mort dans
le ghetto. La neige qui tombera dru aura couvert les trottoirs et les jardins
d’Andrássy út. Sur la grande avenue
vous retrouverez l’alternance de luxueux et flamboyants bâtiments du XIXème
siècle et des ruines qui vous évoqueront la guerre et l’intervention meurtrière
des chars soviétiques en 1956. Après avoir longuement marché dans la neige, vous
devinerez, au loin dans la brume, la haute colonne, l’archange Gabriel aux
ailes déployées, et les statues équestres des héros Magyars d’Hősök tere, dont les manteaux semblent voler dans la brise
du matin de leur arrivée dans la plaine de Hongrie. Derrière la place vous
pourrez patiner sur le lac gelé, les hauts parleurs vous hurleront dans les
oreilles des valses viennoises. Vous vous baignerez ensuite dans une piscine
alimentée par une source d’eau chaude, les flocons tomberont sur vos cheveux et
y fondront. Vous en sortirez à la fois sereine et épuisée. Sur le quai vous
guetterez le métro, massif et rectangulaire, de longues lignes strieront sa
carlingue et vous évoqueront les années 1950. Les plaques en aluminium du
constructeur seront vissées sur la carrosserie : elles seront écrites en
russe.
Février 2013